Avec les Vacances d’Eté arrive la grande transhumance des troupeaux de touristes, agglutinés comme des sardines en boîte, qui polluent et saccagent le littoral. Vous connaissez déjà les attrappe-rêves amérindiens. Mais sachez qu’il y a, en matière d’Art, les attrappe-touristes, bien moins romantiques et pas si artistiques que ça…
Si vous êtes déjà allé à Paris, vous avez vu à Montmartre, place du Tertre, tout un tas de soi-disant artistes barbouiller des portraits pour les visiteurs. Et dans les rues adjacentes, des boutiques à souvenirs, des tableaux représentant des rues de Paris, la Tour Eiffel et autres monuments célèbres. Ne croyez pas que ce soient de vrais peintres qui barbouillent ces croûtes. En réalité, elles sont produites en grande série en Chine puis vendues en gros pour inonder les marchés européens. DAFEN est une ville chinoise où 8 000 artistes (sous payés) produisent à la chaîne trois à cinq millions de tableaux par an dans des « usines d’oeuvres d’art » qui copient et plagient sans vergogne les peintres occidentaux. Les petits malins les achètent en quantité et les revendent à petits prix aux gogos qui s’extasient, ignorant ce qu’est un véritable travail d’artiste.
Allez donc jeter un coup d’oeil chez Ali-Express ou Alibaba (entre autres fournisseurs) et vous serrez édifié(e). Ces toiles sont exportées sans châssis et montées en Europe, ce qui permet de tricher sur leur provenance comme pour les jeans de marque.
Le répertoire iconographique des peintres dits « régionaux » se limite trop souvent a l’imagerie du folklore local, la poule aux oeufs d’or étant le souvenir pour touriste. En Bretagne comme à St Tropez, ce sont les marines, aquarelles de bateaux, phares et mouettes qui se vendent à la pelle. En Provence, ce sont les champs de lavande et les oliviers qui font fureur, sans oublier les cigales. En Camargue, les chevaux, les flamands roses et les affiches de Tauromachie prolifèrent. Dans les ports de pêche, ce sont les barques et les poissons qui ont la côte (sans mauvais jeu de mots) et ainsi de suite. Tout ce déballage commercial furieusement vintage, produit en quantité industrielle, est mortellement ennuyeux.
Parfois la frontière semble floue entre le cliché souvenir de Vacances et une véritable création artistique. Certains peintres, inspirés par leur environnement, se démarquent par leur originalité : ils jouent sur l’humour et la fantaisie et/ou mettent au point un style et une technique personnelle. Mais le grand public est facilement ébloui par la traditionnelle copie de photographie façon aquarelle et par l’académisme rétro-kitsch, au mépris de la modernité. C’est difficile aussi de sortir des sentiers battus quand les services culturels demandent aux artistes de « s’inscrire dans le territoire » pour pouvoir exposer dans les galeries municipales. Sur ce principe (?), le fabuleux Soulages serait exclus d’office !
Heureusement, il y a des électrons libres qui inventent leurs propres règles. La ville de Sète, mère de la Figuration Libre avec Combas et Di Rosa dans les années 1980, est Le Musée à Ciel Ouvert (MACO) consacré au Street Art. Depuis 2008 carte blanche est donnée aux graffitistes qui réalisent des fresques sur les murs de la ville / photo ci-dessus. A voir absolument si vous passez par là, mais en dehors des périodes d’invasion barbare !
N’hésitez pas à donner votre point de vue sur la question touristique !